Reste à charge zéro : Brigitte Bourguignon favorable aux réseaux de soins | Viva le blog

Brigitte Bourguignon*, présidente de la Commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale

Alors que la concertation sur le reste à charge zéro doit se clore en mai, la présidente de la Commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, Brigitte Bourguignon, donne les contours de ce qui serait pour elle une réforme réussie : il s’agit de parvenir à « un panier de prestations nécessaires et de qualités aux tarifs maîtrisés » car, pour l’heure, « le renoncement aux soins brise la promesse de l’égal accès à la santé de notre modèle de protection sociale ». Comme la Mutualité Française, la députée pense que le financement doit en partie relever d’une augmentation des remboursements de l’assurance maladie et d’un développement des réseaux de soins. Quant aux complémentaires, elles ont, selon elle, une carte à jouer sur le volet prévention.

– Quelles sont les conditions, selon vous, pour que la réforme du reste à charge zéro soit un succès ?

La réforme du reste à charge zéro part d’un constat : trop de Français renoncent encore aujourd’hui à des soins essentiels en raison des frais qui restent à leur charge. Ce phénomène est flagrant dans trois secteurs – l’optique, l’audioprothèse et le dentaire – dans lesquels les prix sont fixés librement et déconnectés des tarifs de remboursement. Très concrètement, le reste à charge moyen oscille entre 95 euros pour une paire de lunettes et 135 euros pour une prothèse dentaire. Pour une aide auditive, il culmine à 780 euros !

L’objectif de cette réforme est de lutter contre le renoncement aux soins pour des raisons financières. Car ce renoncement brise l’une des promesses de notre modèle de protection sociale, celle de l’égal accès à la santé, mais il engendre aussi un coût à long terme beaucoup plus important pour l’ensemble de la société.

Avec le reste à charge zéro, il s’agit de donner la possibilité à tous les Français d’accéder à une offre de soins avec un reste à charge nul. Cette préoccupation est au cœur de la concertation avec les acteurs des trois secteurs concernés qui doit déboucher sur la définition d’une offre « standard », c’est-à-dire un panier de prestations nécessaires et de qualité dont les tarifs seront maîtrisés. Il s’agit de passer d’une logique de reste à charge subi à une logique de reste à charge choisi. Les assurés se verront proposer une offre sans reste à charge mais ils pourront continuer à faire le choix d’autres prestations que celles incluses dans le panier de prestations.

– Certains défendent l’idée d’un reste à charge zéro comportemental. Qu’en pensez-vous ?

Le reste à charge zéro comportemental pose la question de savoir si l’on doit lier le niveau de remboursement des soins au comportement des personnes. Cette idée s’inscrit à mon sens dans le cadre de la stratégie nationale de santé qui a pour ambition de promouvoir la prévention dans tous les milieux et tout au long de la vie et de permettre à chacun d’être acteur de sa santé. Je pense que le développement du reste à charge zéro comportemental ou maîtrisé requiert la mise en œuvre d’un accompagnement des populations les plus fragiles leur garantissant un véritable accès à cette prévention. Ce qui nécessite au préalable de lutter contre les déserts médicaux, de promouvoir un égal accès aux soins sur l’ensemble du territoire mais aussi d’améliorer l’accès à l’information.

Enfin, la mise en place d’un éventuel reste à charge zéro comportemental ne doit pas remettre en cause le principe de solidarité qui fonde notre système de santé.  

– Que pensez-vous des premières pistes de réflexion de la Mutualité Française sur le sujet, notamment de financer en partie cette réforme par une augmentation des remboursements de l’assurance maladie et un développement des réseaux de soins ?

Le développement des réseaux de soins est une solution qui permet de réduire le reste à charge pour les assurés mais il convient de veiller au risque de contrôle de l’offre par les assureurs complémentaires. La contractualisation entre les assureurs complémentaires et les professionnels de santé constitue assurément l’une des pistes à approfondir.

Plus globalement, sur le reste à charge zéro dans les trois secteurs – optique, audioprothèse et dentaire –, il doit être le fruit d’un effort conjoint des professionnels de santé sur les prix, de l’Assurance maladie et de l’Etat pour une meilleure prise en charge et des complémentaires notamment sur le volet prévention.

Enfin, si notre objectif est bien de lutter contre le renoncement aux soins pour des raisons financières, la réforme du reste à charge zéro doit nécessairement s’accompagner du déploiement du tiers payant généralisé. Le tiers payant généralisé est techniquement réalisable à brève échéance pour la part obligatoire prise en charge par la Sécurité sociale. Cela constituerait un premier pas non négligeable. En effet, pour des familles défavorisées, ce n’est pas la même chose d’avancer 25 euros plutôt que juste les 7,50 euros de la part complémentaire.

 

* À l’Assemblée nationale, Brigitte Bourguignon dirige « un pôle social », au sein de la majorité LREM, pour faire entendre une sensibilité de gauche au sein du groupe majoritaire.

 

 

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